Définition
Les microcalcifications correspondent à des petites images calciques de taille inférieure à 1 mm, visibles sur une mammographie. Elles sont à distinguer des macrocalcifications (de plus grande taille), qui sont le plus souvent bénignes. Les microcalcifications apparaissent comme des « petits points blancs » situés dans la glande mammaire.
Elles peuvent constituer un point d’appel radiologique d’un cancer du sein, d’où toute l’importance de leur description et/ou de leur analyse.
Mode de découverte
Les microcalcifications peuvent être découvertes :
- A l’occasion d’une simple mammographie de dépistage ;
- A l’occasion d’une mammographie effectuée pour explorer une anomalie clinique du sein (apparition d’une « boule » dans le sein, écoulement mamelonnaire, déformation du sein, augmentation du volume d’un sein, rétraction du mammelon, apparition d’une rougeur au niveau du sein) ou des douleur au niveau d’un sein.
Environ 30 % des mammographies retrouvent des microcalcifications. La grande majorité de ces microcalcifications correspondent à des lésions bénignes (80 à 90 %). La découverte de microcalcifications implique souvent la réalisation de clichés d’agrandissement. Ces clichés, effectués de face et de profil, permettent une analyse encore plus fine du degré de suspicion de cancer du sein.
Modalités de formation - Physiopathologie des microcalcifications
La forme et la distribution des microcalcifications sont étroitement liées à leurs modalités de formation. Les cancers du sein naissent habituellement dans l’unité anatomique de base de la glande mammaire appelée unité ductulo-lobulaire. Cette notion anatomique va conditionner leur forme et leur distribution dans le sein. Les microcalcifications peuvent siéger à différents niveaux de la glande mammaire :
- Dans le tissu conjonctif (tissu de soutien de la glande mammaire) : il s’agit d’une réaction fibreuse secondaire à un processus inflammatoire, cicatriciel ou tumoral ;
- Au contact de l’épithélium galactophorique de surface (tissu constituant les canaux de la glande mammaire) : il s’agit d’une réaction secondaire à une souffrance cellulaire avec nécrose cellulaire ;
- Dans la lumière des canaux galactophoriques (canaux de la glande mammaire) : il s’agit de dépôts secondaires à une obstruction des canaux d’origine bénigne ou tumorale.
Différentes classifications radiologiques visent à corréler au mieux la forme et la distribution des microcalcifications à leur entité histologique (cancer infiltrant, cancer in situ, vaisseaux sanguins, fibroadénome etc.), en fonction de ses considérations physiopathologiques.
Classification BI-RADS de l'ACR
La classification la plus admise actuellement est celle appelée BI-RADS de l’ACR (Breast Imaging Reporting And Data System de l’American College of Radiology). Cette classification permet une certaine harmonisation de la description des images mammographiques. Elle permet de répartir ces images en 6 catégories selon le degré de probabilité d’un cancer du sein. En fonction de la catégorie où est classée l’image mammographique est définie l’attitude de la prise en charge : contrôle habituel (tous les deux ans), contrôle rapproché (tous les 6 mois pendant 2 ans), biopsie, chirurgie ou une autre prise en charge appropriée.
CLASSIFICATION BIRADS DE L’AMERICAN COLLEGE OF RADIOLOY (ACR), ADAPTEE PAR L’ANAES
CATEGORIE
| DESCRIPTION | CONDUITE A TENIR |
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ACR 0
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Comparaison avec les documents antérieurs, incidences complémentaires, clichés centrés comprimés, agrandissement de microcalcifications, échographie, etc. C’est une classification « d’attente », qui s’utilise en situation de dépistage ou dans l’attente d’un second avis, avant que le second avis soit obtenu ou que le bilan d’imagerie soit complété et qu’ils permettent une classification définitive.
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Des investigations complémentaires sont nécessaires
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ACR 1
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Mammographie normale.
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ACR 2
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• Opacité ronde avec macrocalcifications (adénofibrome ou kyste) • Ganglion intramammaire • Opacité(s) ronde(s) correspondant à un/des kyste(s) typique(s) en échographie • Image(s) de densité graisseuse ou mixte (lipome, hamartome, galactocèle, kyste huileux) • Cicatrice(s) connue(s) et calcification(s) sur matériel de suture • Macrocalcifications sans opacité (adénofibrome, kyste, adiponécrose, ectasie canalaire sécrétante, calcifications vasculaires, etc.) • Microcalcifications annulaires ou arciformes, semi-lunaires, sédimentées, rhomboédriques • Calcifications cutanées et calcifications punctiformes régulières diffuses |
Il existe des anomalies bénignes ne nécessitant ni surveillance ni examen complémentaire
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ACR 3
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• Microcalcifications rondes ou punctiformes régulières ou pulvérulentes, peu nombreuses, en petit amas rond isolé • Petit(s) amas rond(s) ou ovale(s) de calcifications amorphes, peu nombreuses, évoquant un début de calcification d’adénofibrome • Opacité(s) bien circonscrite(s), ronde(s), ovale(s) ou discrètement polycyclique(s) sans microlobulation, non calcifiée(s), non liquidiennes en échographie • Asymétrie focale de densité à limites concaves et/ou mélangée à de la graisse |
Il existe une anomalie probablement bénigne pour laquelle une surveillance à court terme est conseillée
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ACR 4
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• Microcalcifications punctiformes régulières nombreuses et/ou groupées en amas aux contours ni ronds, ni ovales • Microcalcifications pulvérulentes groupées et nombreuses • Microcalcifications irrégulières, polymorphes ou granulaires, peu nombreuses • Image(s) spiculée(s) sans centre dense • Opacité(s) non liquidienne(s) ronde(s) ou ovale(s) aux contours lobulés, ou masqués, ou ayant augmenté de volume • Distorsion architecturale en dehors d’une cicatrice connue et stable • Asymétrie(s) ou surcroît(s) de densité localisé(s) à limites convexes ou évolutif(s) |
Il existe une anomalie indéterminée ou suspecte qui indique une vérification histologique
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ACR 5
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• Microcalcifications vermiculaires, arborescentes ou microcalcifications irrégulières, polymorphes ou granulaires, nombreuses et groupées • Groupement de microcalcifications quelle que soit leur morphologie, dont la topographie est galactophorique • Microcalcifications associées à une anomalie architecturale ou à une opacité • Microcalcifications groupées ayant augmenté en nombre ou microcalcifications dont la morphologie et la distribution sont devenues plus suspectes • Opacité mal circonscrite aux contours flous et irréguliers • Opacité spiculée à centre dense |
Il existe une anomalie évocatrice d’un cancer
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La classification tiendra compte du contexte clinique et des facteurs de risque. La comparaison avec des documents anciens ou le résultat d’investigations complémentaires peuvent modifier la classification d’une image : une opacité ovale régulière classée ACR 3 mais présente sur des documents anciens peut être reclassée ACR 2, quelques calcifications résiduelles après prélèvement percutané contributif bénin d’un amas classé ACR 4 peuvent être reclassées ACR 2, etc.
Double foyer de microcalcifications ACR 5
Autres critères mammographiques
D’autres critères mammographiques ou cliniques sont à prendre en considération lors de l’évaluation globale du risque de cancer devant la découverte de microcalcifications :
- L’âge supérieur à 45 ans ;
- La présence d’antécédents familiaux de cancer du sein ;
- La présence d’un antécédent personnel de cancer du sein ou d’une mastopathie à risque de cancer du sein ;
- Apparition récente ou modification de l’aspect des microcalcifications déjà connues ;
- Le nombre et la distribution des microcalcifications (plus elles sont nombreuses et groupées, plus la probabilité de cancer augmente).
Critères en faveur de la bénignité
Certains éléments orientent vers la nature bénigne des microcalcifications :
- Vasculaires ;
- Annulaires à centre clair ;
- Rondes ;
- De grande taille ;
- Cutanées ;
- Pariétales ;
- De distribution diffuse, éparse.
Critères intermédiaires
- Amorphes, indistinctes ;
- Grossières, hétérogènes ;
- De distribution régionale.
Critères en faveur de la malignité
Certains éléments orientent vers la nature maligne des microcalcifications :
- Polymorphes ;
- Linéaires, ramifiées ;
- De distribution groupée, en amas, linéaires ou segmentaire.
Exploration des microcalcifications
Après avoir classé les microcalcifications dans une catégorie de la BI-RADS de l’ACR, se pose la question de l’exploration des microcalcifications. Cette exploration histologique s’impose dans les catégories BI-RADS 5, BI-RADS 4 et dans certains cas de BI-RADS 3. Son but est à la fois diagnostique et stratégique :
- A visée diagnostique : l’exploration permet de confirmer la bénignité ou la malignité ;
- A visée stratégique : l’exploration permet de confirmer la malignité et d’adapter la prise en charge chirurgicale (planifier l’ablation du ganglion sentinelle, un curage axillaire ou une mastectomie en plus du geste chirurgical initialement prévu portant sur les microcalcifications).
Plusieurs techniques permettent l’exploration histologique des microcalcifications :
- Microbiopsie sous stéréotaxie (prélèvement guidé sous contrôle radiologique ou échographique) ;
- Macrobiopsie sous stéréotaxie (prélèvement guidé sous contrôle radiologique ou échographique par Mammotome ou par ABBI) ;
- Exploration chirurgicale (intervention chirurgicale).
Dans tous les cas, une radiographie des « carottes » prélevées par biopsie ou de la « pièce opératoire » prélevée chirurgicalement est pratiquée. Cette radiographie permet de vérifier que les microcalcifications ont été effectivement prélevées afin de s’assurer que l’analyse histologique porte bien sur les tissus suspects.
Prise en charge - Traitement chirurgical
Différents cas de figure sont possibles au terme de la classification des microcalcifications et de leur exploration histologique. En fonction de la catégorie des microcalcifications, de leur étendue (quelques millimètres à plusieurs centimètres) et de leur nature histologique (lésions bénignes, lésions atypiques, cancer in situ, cancer infiltrant) l’attitude peut varier d’une simple surveillance mammographique à une mastectomie avec curage axillaire.
Quelques principes encadrent la prise en charge chirurgicale des microcalcifications :
- Repérage préopératoire : un repère métallique (appelé hameçon ou harpon) est placé la veille de l’intervention dans le foyer de microcalcifications afin d’orienter le chirurgien ;
- Une voie d’abord chirurgicale esthétique est choisie dans la mesure du possible, en fonction du siège anatomique des microcalcifications et de leur étendue ;
- Une analyse histologique extemporanée (per opératoire) est effectuée en cas de nodule palpable au sein de la « pièce opératoire » ;
- Une radiographie per opératoire de la « pièce opératoire » est effectuée afin de s’assurer de l’ablation complète de toute la zone de microcalcifications.